COUNSELLING POUR LES REUNIONS D'ADOPTION

RENONCER AUX ATTACHEMENTS: LES RETOMBÉES POSITIVES NON ATTENDUEs



J’ai eu une expérience extraordinaire de renoncement à un attachement, laquelle m’avait échappé pendant toutes ces années. Les attachements les plus ardus sont, évidement, ceux que notre égo garde secret de notre conscience, d’où l’incapacité de lâcher prise. Cette expérience m’a vraiment fait comprendre les couts afférents aux attachements.

J’avais cherché pour ma fille pendant plusieurs années, de sorte que lorsqu’elle eut 30 ans, je m’étais fait à l’idée qu’elle n’avait peut-être pas le désir de me retrouver. Là où elle fut adoptée, je croyais que les dossiers d’adoption avaient déjà été ouverts depuis plusieurs années (Mouvement Retrouvailles), et donc j’avais conclu que si elle s’était inscrite au registre post adoption, une correspondance aurait déjà été établie.

Je n’avais jamais voulu m’imposer sur elle. Ne connaissant pas les circonstances de son enfance, il était toujours possible qu’elle n’était pas au courant de son adoption. Je ne voulais pas bouleverser sa vie d’aucune façon. Donc, pour ces raisons et d’autres, j’avais toujours espérer qu’elle me trouverait en premier. Cependant, je m’étais alors rendue ou je contemplais lâcher prise complètement du rêve de la retrouver. Ayant renoncé à cet enfant pour fins d’adoption avait eu un impact sur ma vie à tous les niveaux, et coloré chaque évènement jusque-là. J’avais conclu que peut être que le temps était venu pour moi de renoncer à elle de nouveau.

Cette fois, cependant, je fermerais aussi la porte sur le passé, en plus de laisser tomber tout désir pour, et toute préoccupation avec, recevoir de ses nouvelles dans le futur. En d’autres mots, je vivrais maintenant ma vie dans le présent.

Alors que je contemplais cette nouvelle approche, je réalisai dans quelle mesure j’avais vécu ma vie en suspens, retenue par un deuil inachevé. Je devins consciente de tout ce que j’avais en commun avec les familles des ‘personnes disparues’, dont le deuil, pour des raisons pratiques, ne peux aussi pas être complété. Cette porte, qui est laissée entre ouverte avec lueur d’espoir de retrouver la personne bien aimée toujours vivante, empêche par inadvertance la conclusion du deuil, le stage final étant l’acceptation. Elizabeth Kubler Ross décrit cet état d’esprit comme n’ayant plus d’affaires à régler avec le passé, ce qui empêche les projections dans le futur et ainsi, constitue la seule façon d’être présent dans nos vies.

Les familles des personnes disparues font vivre l’espoir en gardant les effets personnels intacts. Les choses tangibles sont là et bien en vue. Pour ma part, j’avais en mémoire tous les détails que j’avais attentivement rassemblés au sujet de l’époque et de l’histoire de sa naissance. Chaque fragment de souvenir était protégé afin de ne jamais disparaitre, de par une remémoration continuelle chargée d’émotions. Veiller sur le souvenir servait à maintenir l’illusion d’un rapport.

Malgré ma compréhension intellectuelle d’avoir fait le choix responsable en renonçant à mon enfant pour fins d’adoption, reste qu’au niveau inconscient, cela n’avait pas été complètement intégré. Ainsi, j’étais dans le gouffre entre ces deux niveaux d’où la création d’une impasse qui m’empêchait de me rendre à l’acceptation, le dernier stage du deuil.

J’avais commencé ce voyage sur la route des souvenirs pendant les petites heures du matin, avant que l’esprit soit occupé avec les soucis de la vie quotidienne. Avec la liberté de m’évader, mon esprit avait entamé un parcours inusité, loin des patterns habituels. Lorsque je pensais à ma fille, une de mes plus grandes craintes avait toujours été que je ne la reverrais jamais. Cette fois, à ma grande surprise, je m’entendis penser ‘et si c’était pour le mieux?’. Je commençai alors, pour la première fois, à considérer le côté positif d’un tel résultat. Je pouvais lâcher prise du besoin de la connaitre et faire confiance qu’elle jouissait d’une belle vie. Je me sentais comme si j’avais franchi un seuil et pouvais dorénavant voir la situation à partir d’une perspective plus élevée.

C’est alors que la chose la plus étonnante s’est produite. Comme dans un état de rêve, je me suis vu donner le nouveau-né a une personne en face de moi. Je suis devenue observatrice, regardant cette autre personne qui dorénavant tenait le nouveau-né. Comme si c’était la première fois que j’étais en fait séparée d’elle, je pouvais maintenant voir son petit corps dans son ensemble rose, alors que sa nouvelle maman la tenait. Toute cette scène était simplement surréaliste. En cet instant, j’avais complétement renoncé à elle et à toute notion d’être a jamais réunie avec elle. Je me sentais étonnamment paisible.

Ce qui se produit par la suite fut non moins d’un miracle. Trois semaines après avoir renoncé encore une fois à mon enfant, je reçu la nouvelle que la longue quête de retrouvaille de ma fille avait donné des résultats. La jeune travailleuse sociale qui me contacta avoua être perplexe quant à comment elle avait trouvé mon dossier, comme s’il était soudainement apparu sur le dessus de la pile.

Néanmoins, peu après, ma fille et moi furent réunies. Ni elle ou moi étions tout à fait prêtes, mais nous étions voulantes de vivre les montagnes russes d’émotions à prévoir. Comme il s’est avéré, ma fille avait retardé sa recherche pour moi car on lui avait donné des renseignements fautifs, et non parce qu’elle n’avait pas voulu me retrouver.

Au moment de sa naissance au Québec, c’était coutumier pour les agences gouvernementales de falsifier les renseignements personnels des enfants dans leurs dossiers d’adoption. Les parents adoptifs de ma fille avaient été informés qu’ils adoptaient une orpheline. Elle avait grandi croyant que j’étais décédée. Elle était à la fin de la vingtaine avant d’apprendre, tout à fait par accident, que j’étais possiblement encore vivante. Elle avait donc commencé sa recherche pour moi, et cela pris trois ans avant qu’une correspondance soit faite.

J’ai partagé cette histoire plusieurs fois, et je ne sais pas encore pourquoi cela m’a pris tant d’années à comprendre que j’avais inconsciemment bloqué le processus de réunion. Rien de moins qu’un lâcher prise complet de ma conscience du bébé était requis afin de faire de la place pour que l’adulte apparaisse.

Dans cette situation, je ne peux que conjecturer que le geste du lâcher prise doit être un projet inconditionnel à 100%, sans aucune réserve quelle qu’elle soit. Un acte de volonté uniquement ne suffit pas. Plutôt, tous les niveaux de la conscience doivent être d’accord, afin d’empêcher notre égo d’accorder un statut permanent à ce qui est, de par sa nature, impermanent. Cependant, je ne me réfère pas à l’ego psychologique postulé par Freud, mais plutôt à notre sens erroné d’un soi existant intrinsèquement. Un pattern habituel que nous avons développé résultant de l’expérience de nombreuses vies antérieures. C’est ce qui crée l’effet magnétique qui nous entraine à former des attachements.

Je réalise maintenant que cela est un exemple parfait de jusqu’où s’étend la préoccupation addictive de l’égo de prouver son existence indépendante. La plupart d’entre nous ont entendus l’expression ‘les accros n’ont pas de rapports, ils ne font que prendre des otages’. Dans ce cas-ci, l’égo gardait le nouveau-né en otage, avec la honte et la crainte comme complices favoris, afin de maintenir l’illusion d’un rapport, habilement installée juste en dessous de la surface de notre conscience quotidienne.

La question devient alors qu’est qui peut tout faire sauter? Qu’est ce qui causera à l’égo de perdre son emprise sur le faux sens d’existence indépendante, ce qui maintient l’avis d’une immanence autonome, maintenant ainsi la séparation?

En bref, la réponse est que nous réalisons normalement rétrospectivement qu’une situation particulière nous a permis de contourner l’attachement de l’égo, ce qui bloquait antérieurement le processus de guérison. Nonobstant les circonstances ayant provoqué une réaction non familière chez l’individu, la seule motivation capable de contourner un attachement à l’égo est de nature altruiste.

L’altruisme est la méthode par laquelle nous oublions momentanément notre propre souffrance et devenons plutôt présents à la souffrance des autres. Voilà comment nous faisons l’expérience complète de notre interdépendance. Tel est la compassion, qui évoque un sens élevé de responsabilité d’alléger la souffrance des autres.

A un moment donné, nous faisons toutes et tous face à un évènement qui crée un point tournant dans nos vies qui nous donne l’opportunité de faire un tel saut quantitatif. Voici comment les causes et conditions se sont rassemblées afin de me permettre de vivre une telle expérience.


LA NAISSANCE DU TABLEAU DE LA FAMILLE


En juillet 2004, le gouvernement de l’Alberta distribua des dépliants dans chaque foyer annonçant des changements dans la loi concernant les dossiers d’adoption. Je savais que ces changements allaient se produire. J’avais entendu un message d’intérêt public de 15 secondes dans le contexte d’un résumé des actualités quelques semaines plus tôt.

Peut-être parce que j’entendis les nouvelles en français, ma réponse instinctuelle immédiate fut une préoccupation pour le sort des personnes âgées dans la communauté franco-albertaine.

Dans un instant j’ai envisagé une femme plus âgée avec des boucles blanches avec un air abasourdi, alors qu’elle se retrouvait sur son perron devant un étranger qui affirmait être son enfant biologique.

Je connaissais toute la préparation requise pour une réunion avec un enfant rendu en adoption il y a tellement longtemps. J’avais traversé cette expérience quatre années auparavant.

Alors, lorsque le dépliant arriva dans la poste annonçant la nouvelle loi, je réalisai que cette information était livrée uniquement en anglais, conformément à la loi Albertaine. La loi en question devait entrer en vigueur, et les parties intéressées avaient jusqu’au 1er novembre pour enregistrer un véto sur la divulgation, afin d’assurer que leurs renseignements identificateurs ne soient pas rendus publics. Puisque cela était livré avec le pourriel, et qu’il restait à peine trois mois pour prendre une décision tout aussi importante, je frémissais à penser que cette information vitale ne se rendrait pas à celles et ceux qui en avait le plus besoin. Les personnes âgées dans des résidences ou autres logements partagées, ne seraient aussi probablement pas sensibilisés par rapport à ce nouveau développement.

Mon esprit reparti vers cette vielle dame aux cheveux blancs. Je me demandais quel était son histoire. Elle pouvait être une version plus âgée de moi, ayant donné naissance à un enfant dans une communauté francophone, non-mariée et forcée par la honte de rendre son enfant en adoption, selon la coutume du temps. De connivence avec les tabous religieux et sociaux, et en vertu des lois des années 1920s, la cour scellait les dossiers d’adoption. On assurait la confidentialité aux mères biologiques et ont leur faisait croire qu’une réunion avec leur enfant dans le futur était peu probable. Exhortée de ne jamais même essayer de ce faire, le chapitre devrait être fermé en permanence, et tous les sentiments appropriés et les émotions devaient supposément être surgelés.

Cette vielle dame m’apparut comme un archétype de toutes les femmes qui n’ont jamais pu conclure le deuil d’une perte toute aussi innommable. Indéniablement, chaque histoire est unique et personnelle. Cependant, les éléments de trahison, de honte et d’engourdissement psychiques sont aussi omniprésents de par chacune d’elle.

J’ai pu maintenir la vision de cette figure archétype généreuse, tout à fait consciente du privilège d’être invitée à partager son moment. J’ai été témoin de sa peine, alors qu’elle était incapable de prévenir le dégel instantané de toutes les émotions non exprimées du passé. Elle n’était évidemment pas préparée pour tout cela. Ramenant sa conscience à la réalité du présent, elle était aussi concernée pour sa famille qui ne savait pas. Les retombées seraient monumentales.

J’ai senti tellement de compassion. Je voulais soulager sa douleur. Quoi que j’aie été bénie par une réunion heureuse quatre années plus tôt, je n’avais pas envie de discuter ma situation indistinctement. J’étais encore très circonspecte. Cependant, l’incident du dépliant dans ma boite postale avait eu un effet transformateur. Soudainement, j’étais prête à contourner ma conscience de soi et ma crainte de divulgation de soi. J’ai tendu la main à la communauté francophone de par les médias, espérant alerter celles et ceux qui n’avaient pas entendu parler de ces changements, soit à cause de la barrière linguistique ou pour d’autres raisons.

Par ailleurs, je fus déconcertée par la résistance que j’ai rencontrée lorsque j’ai abordé l’éditeur d’un journal francophone particulier. Comme il s’agissait d’une publication mensuelle et la seule source officielle de renseignement imprimée en français, le temps pressait pour que mon article soit inclus dans le prochain numéro. J’ai dû alors expliquer qu’il s’agissait d’une responsabilité du journal d’annoncer ce changement législatif qui ne pourrait qu’affecter plusieurs personnes. Il semblait y avoir un manque d’intérêt ou de renseignement. Peut-être que cela était seulement une indication que le sujet de l’adoption était encore un tabou dans notre société, et, dans une large mesure, le reste encore.  De toute façon, mon article fut publié à temps et je me suis senti alors habilitée et renforcée dans ma démarche.

Je me sentais émancipée. J’avais un sens de liberté que je n’avais jamais cru possible pendant toutes ces années. J’arrivais peine à me reconnaitre. Je partais d’un lieu de peur et de doute pour devenir activiste. Je m’étais écartée de mon chemin. Comme humains, chaque fois que nous allons au-delà de notre sphère de soi et faisons l’expérience de la compassion, nous nous permettons de ressentir la peine d’autrui, et notre propre peine diminue. Le cadeau est vraiment pour nous.

Au cours des semaines suivantes, alors que je contactai le réseau d’agences et d’organisations fournissant des services aux personnes âgées de la communauté franco-albertaine, autre chose prenait forme dans ma propre conscience. Je devins consciente que le travail de ma vie était à se révéler comme un objectif prédestiné. C’est à dire, prédestiné par les désirs du cœur. Je réalisai très bientôt que mon éducation, ma formation et ma carrière jusque-là avaient formé un nexus pour mon nouveau projet. Ma fascination avec les dynamiques familiales m’avait porté à développer des méthodes de counseling qui incorporaient aussi les autres membres de la famille afin de mettre de la lumière sur le cheminement d’âme et le développement psychologique de l’individu. En bref, ceci est connu comme la psychologie transformatrice.

Au début de ma carrière, j’avais été émerveillée par comment les gens pouvaient transformer leurs vies en ayant la volonté de changer leur perception par rapport à leur situation. Le mot clé étant ‘volonté’.

Lorsqu’un individu peut se voir comme faisant partie d’un groupe d’apprentissage qui se réuni afin de contribuer à la guérison et au développement de chaque âme, le résultat est un changement de focus du blâme vers la responsabilisation. Cette notion existe depuis très longtemps. Le Bouddha fut le premier à l’appeler karma. C’est une réalisation très autonomisante alors qu’elle facilite l’évolution de la perception de soi uniquement comme victime des circonstances, et nous donne au lieu la liberté d’exécuter le changement.

Les outils qui me semblait les plus utiles pour moi afin d’acquérir une plus grande perspective quant aux dynamiques familiales sont venues de la science et la spiritualité des nombres. J’avais développé l’art habile de l’interprétation des tableaux individuels et familiaux. Je pouvais maintenant visualiser le tableau en couleur. Les nombres utilisés en conjonction avec les couleurs assignées créeraient un grillage indiquant les similarités et les différences entre les membres des familles biologiques et adoptives. Tout le concept de l’attraction à sa propre famille serait frappant.

Je procédai à faire le tableau de ma propre famille. Je calculai les données (noms et dates de naissance) de ma propre famille d’origine ainsi que celle de la famille adoptive de ma fille et coda colorimétriquement les résultats. Quelle révélation! Même sans la capacité d’interpréter la philosophie des nombres, l’affichage de couleurs en disait long.

Je savais qu’il y aurait plusieurs applications pour ce tableau. Il pourrait être utilisée pour acquérir une compréhension plus approfondie des dynamiques impliquées dans tous les rapports, y compris ceux de:

  • La famille d’origine
  • Sa propre famille avec conjoint et enfants
  • La belle famille
  • La famille post adoption
  • Les groupes en milieu de travail

Tout au moins, cet outil merveilleux aidera à générer de la communication et encouragera le dialogue. Il peut aussi fournir un encadrement et aider à la médiation des conflits. Certes, il aidera aux individus à mieux identifier les liens de parenté.

Je ne peux que penser que le destin a participé dans ce projet. Maintenant, lorsque je regarde une carte de dynamique familiale, je vois une partition de musique pour une symphonie dont la dernière note reste encore à écrire.

Lâcher prise du nouveau-né afin de permettre à l’adulte de se présenter m’a en fait mené au prochain attachement de l’égo auquel je devais renoncer. Je me réfère ici à l’identité qui s’était formé autour du sens de la perte. Lorsqu’on s’identifie a une histoire de notre passé, notre vraie identité est gardée à l’écart de notre conscience en plus de notre habilité de ressentir de la compassion pour soi-même.

Les circonstances qui m’ont permis d’entrevoir la réalité de notre vraie nature interdépendante ont été provoquées par un désir altruiste, qui a son tour ajouta toute une autre dimension à mon travail dans le domaine de la psycho-généalogie. Ainsi, le fruit de la renonciation s’est révélé de par la création des ‘ tableaux de dynamiques familiales’.



LES TABLEAUX DE DYNAMIQUES FAMILIALES DE CÉLINE


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